LA VOIX DU NORD DU MERCREDI 14 SEPTEMBRE
1983
Au calendrier de l"Histoire
8
et 9 septembre 1943
En voulant bombarder des objectifs militaires
Les aviateurs alliés rasent Le Portel :
500
morts
cETTE année 1983 sera marquée par le quarantième anniversaire des terribles bombardements du Portel, petite localité au sud de Boulogne-sur-Mer, qui les 4, 8 et 9 septembre 1943, fut détruite à 90 %. On déplora près de 500 morts et des centaines de blessés parmi la population civile.
Pourquoi un tel carnage dans
cette
station balnéaire ?
L'abbé
Bouveur écrit à ce sujet : «Le Portel a été bombardé et détruit pour
simuler les préparatifs d'un débarquement dans le Pas-de-Calais et pour
diviser les forces de l'Axe en attirant des troupes dans le nord de la France au
moment même où les alliés réalisaient leur débarquement en Italie, les 8
et 9 septembre 1943 ».
Louis
Davault, quant à lui, pense « A vrai dire, le tout peut se limiter à une
seule phrase : les Anglais ont voulu tester les défenses â l'entour du Portel
pour rééditer l'opération « Jubilee » de Dieppe... Dans quel but ?
Vraisemblablement pour éprouver les fortifications allemandes dans ce secteur
et entretenir le moral et l'entraînement des troupes, des commandos en
particulier... mais l'échec a été complet ».
Ce
sont des raisons « légères » au vu des victimes qui ont
péri dans cette apocalypse. Pas une famille du Portel qui n'ait été épargnée.
Le
premier bombardement survint le samedi 4 septembre. Le plus
grave depuis le début de ta guerre. Et,
déjà, plusieurs victimes. Mais c'est !e 8 septembre vers 19 h, que, tout va
commencer. Première alerte vers 18h. Rien ne se passe. Il n'en
sera pas de même une heure plus tard. Il fait beau ce soir-là. C'est un mois
de septembre plein de soleil, un soleil qui, dans quelques instants, sera éclaboussé
de sang.
L'attaque
commence vers 19 h 30. Les bombes tombent un peu partout et, avec elles, le feu
prend des proportions importantes. «Les premiers secours s'organisèrent
spontanément. jusque 21 h 30, on lutta contre les incendies de la rue Victor
Hugo, on dégagea les blessés, là où c'était possible », raconte l'abbé
Boidin, alors vicaire au Portel. « A la lueur de lampes de fortune, on
essayait de dégager des personnes bloquées sous leur maison effondrée. Des
plaintes, des appels angoissants nous parvenaient de tous côtés. C’était
atroce... Ici, on fouillait et on parvenait à extraire des blessés des décombres,
mai, plus loin, il était impossible de tenter le moindre geste pour sortir un
éventuel survivant».
« Un peu avant 22 h, un cri général « Les revoilà ». Cela paraissait incroyable ! Et pourtant… Par vagues successives, à la lueur brillante des fusées, les bombardiers s'acharnaient sur la pauvre cité, déjà meurtrie et mutilée lançant des centaines de bombes.
Ce
pilonnage dura jusqu'à environ une heure du matin le 9 septembre, avec de
courtes et de rares accalmies. Mais, vers 9 heures, les bombardements reprirent
jusque midi. « Cette attaque fut d’une violence inouïe. J’ai le
douloureux souvenir d’avoir vu tomber, à mes pieds, mortellement blessées,
deux personnes avec lesquelles j’étais en train de m’entretenir »
raconte encore l’abbé Boidin.
Vers
12h30 – 13 h, les bombardements cessèrent enfin. Un silence de mort régnait
sur Le Portel … exsangue.
II y eut, répétons-le, près de
500 morts et des centaines de blessés, dont certains très grièvement. Dans la
ville, rares étaient tes maisons qui tenaient encore debout.
L'administration décida alors l'évacuation des survivants, qui allèrent se réfugier dans la Marne, notamment.
Ville
martyre, Le Portel recevra par la suite la croix de guerre avec cette citation :
« Le Portel, cité martyre et symbole de la Résistance à l'envahisseur, a
été écrasée pendant la guerre 1939-45, sous de nombreux bombardements dévastateurs,
qui décimèrent la population, notamment ceux des 4, 8 et 9 septembre 1943.
A
payé un lourd tribut à la libération du sol natal et donne ainsi l'exemple
du plus pur esprit de sacrifice au service de la patrie. Cette citation comporte
l'attribution de la croix de guerre avec étoile d'argent ». C'était
en 1949, six ans après.
Depuis,
un monument a été élevé à la mémoire de tous ceux et toutes celles
qui périrent dans cet enfer : le Mémorial
des victimes civiles et des péris
en mer.
Chaque
année, à pareille époque, Le Portel se souvient et, dans la foule qui se
presse aux manifestations devant ce mémorial, plus d'une larme coule sur les
joues de cette population porteloise, si durement touchée durant la dernière
guerre.
Sources : Cercle historique portelois