La ville du Portel détruite à 90 % : un
tas de ruines.
(Reproduction,
«La Voix du Nord»)
La
vérité est maintenant connue d'une manière non contestable en ce qui concerne
ces bombardements, qui constituent l'une des plus tragiques bavures de la dernière
guerre.
La
vérité, tout d'abord sur les unités de bombardement engagées dans cette
affaire. Le 8 septembre, ce furent les Marauders du 386ème groupe de
la 8 ème U.S. Air Force. Dans la nuit du 8 au 9, furent à l'œuvre
les Wellington, les Stirling, les Halifax et les Mosquito du Bomber Command de
la R.A.F. auxquels s'étaient joints les bombardiers des groupes 405 et 432 de
la Royal Air Force canadienne et quatre forteresses volantes B17, dont on
initiait les équipages aux vols de nuit. Le raid de la matinée du 9 fut
effectué, à nouveau, par les Marauders américains.
La
vérité en ce qui concerne
la stratégie de l'opération, appelée
« Opération Starkey», très vaste, qui englobait les bombardements du
Portel, montée uniquement par un simulacre de débarquement, pour provoquer un
grand combat aérien
et,
ainsi, entraîner la destruction de
la Luftwaffe dont les appareils restèrent prudemment au sol. Ce fut donc, de ce
point de vue aussi, un fiasco, l'état-major allemand ne tombant absolument pas
dans le piège tendu par le général, Sir Frederik Morgan, chef dit SHAEFF, qui
ne faisait qu'appliquer les instructions du L.C.S. (London controlling section),
installé, dès avril 1941, au quartier général de Churchill et dirigé par le
colonel Henry Bevan.
Pourquoi ce choix ?
La
vérité sur le choix du Portel. Oui, pourquoi Le Portel ? Pour répondre à
cette question qui jusque maintenant n'avait eu aucune réponse officielle et
qui n'en recevra sans doute jamais, nous disposons du témoignage écrit,
donné par le professeur R.V. Jones, le conseiller scientifique personnel de
Churchill. Le principe de l'opération étant décidé, on choisit l'un des
points forts de la côte française et notamment celui qui avait la D.C.A. la
plus efficace. La zone de bombardement choisie comportait les objectifs suivants
: la terrible batterie lourde antiaérienne du Mont-Soleil à Outreau, deux
grandes installations de radar au sud-est du Portel, la batterie du fort d'Alprech,
près de l'aérodrome et celui-ci, le fort du Mont-de-Couppes et le radar qui était
situé un peu plus au nord.
Or,
constate le professeur R.V. Jones, les habitations du Portel se trouvaient au
centre de ces objectifs répartis dans un rayon de 1 O0O mètres. Il reconnaît
qu'il y eut des lacunes dans le marquage des objectifs, la technique nouvelle
des Pathfinders n'étant pas encore éprouvée. «Ainsi, nous a-t-il écrit
personnellement, Le Portel n'a pas été bombardé délibérément, mais il
avait l'infortune de se trouver au centre d'une zone que les Allemands avaient
lourdement fortifiée
».
Il
admet que les alliés tirèrent les enseignements nécessaires de ce qu'il
appelle une erreur (mistake) et que nous préférons traduire par le mot «
bavure », le seul qui convienne.
G.B.